Les amis de Force-Ouvrière. Bulletin n°18 – Septembre 2023

LES AMIS DE FORCE-OUVRIÈRE

 

La question de l’audit des finances
de Force-Ouvrière est plus que jamais posée
avec le Rapport de la Cour des Comptes !

Tant d’argent public versé à FO
pour quoi faire et pour qui  ?

 

L’institut de recherches économiques et sociales, l’IRES, organisme public, finance des travaux. 

Cet argent public est destiné aux organisations syndicales en contrepartie d’études.

Sauf qu’à Force-Ouvrière ce sont, comme le dit Le Canard enchaîné, surtout des « études fantômes ». Cela fait « environ 240 000 euros par an pour FO », selon Le Canard.

Donc c’est d’abord FO qui est en cause pour ne pas fournir des études alors qu’elle en a reçu le financement public.

Les statuts de l’IRES indiquent que l’objectif de l’association est «le dialogue social ». Toutefois le Rapport de la Cour des Comptes met en évidence des études dont le thème pouvait paraître éloigné des enjeux économiques et sociaux du dialogue social ou très pointu, comme le font apparaître les quelques titres d’études suivants : 

  • « Industrie et travail dans la peinture de la deuxième moitié du XIXème », (81 900 €, CGT-FO, 2013). 
  • « La Turquie en route vers l’UE ? Une étude de la convergence régionale et structurelle vers l’Union Européenne » (79 400 €, CGT-FO, 2008). 
  • « Croissance et respect de l’environnement : une équation difficile à résoudre pour la Chine » (78 100 €, CGT-FO, 2010)

Rapport de la Cour des Comptes, pages 34-351.

https://www.ccomptes.fr/fr/publications/linstitut-de-recherches-economiques-et-sociales-ires

Le rapport de la Cour des Comptes précise : 

« La CGT-FO, principalement concernée, a indiqué à la Cour, sous la signature de son Secrétaire Général, avoir « du mal à saisir les raisons objectives qui cantonneraient les organisations sociales au dialogue social, de surcroît contemporain… Nos programmes d’études trouveraient vite leur limite s’ils ne devaient porter que sur le dialogue social contemporain ». (p.35 du Rapport)

C’est pourtant bien l’objet de l’association !

Donc premier problème : des thématiques proposées par FO dont on ne voit pas le rapport direct avec « le dialogue social contemporain »…

Mais le vrai problème, c’est que, toujours selon le Rapport : 

Les retards dans la réalisation d’études lancées par la CGT-FO. Une douzaine d’études lancées par le syndicat CGT-FO n’était toujours pas achevée, voire commencée, en 2022 entraînant un délai de réalisation supérieur ou égal à 10 ans depuis leur approbation et leur financement initial. 

En 2008, la CGT-FO a proposé le thème de « La protection sociale, un levier du développement économique » et a perçu 58 610 € (70 % d’un budget de 83 729 €). Dix ans après, en 2018, un avenant est passé avec l’IRES, après approbation de l’Assemblée Générale, transformant le thème de l’étude qui porte désormais sur « Le contrat d’impact social ».

Près de quatre ans après, au 1er mars 2022, le syndicat n’avait toujours pas trouvé de prestataire pour la réaliser. Un délai de quatorze ans s’est donc écoulé depuis l’attribution de la dotation.  

En 2008 toujours, ce même syndicat présente un projet d’études portant sur « Les 60 ans de la CGT-FO ». En 2019, le thème initial est abandonné par un avenant au profit d’une « Étude historique sur le rôle de Léon Jouhaux à l’OIT ». Le syndicat avait perçu 66 571 € en 2008 (sur 95 102 € budgétés). 

La CGT-FO a indiqué réaliser cette étude en interne. Le rapport, n’avait toujours pas été remis au 1er février 2023, soit 15 ans après le versement de 70 % du montant de l’étude.  

Le Rapport conclue : 

« Au 1er octobre 2022,
aucune des études financées
n’avait été remise à l’IRES. »

Le rapport précise : 

Le constat de la Cour n’est effectivement pas contesté par la CGT-FO qui, dans la réponse de son Secrétaire Général a plaidé des problèmes internes : 

« Nous souhaitons rappeler à la Cour, que notre organisation a traversé en 2018 de nombreuses difficultés qui ont affecté très sérieusement le bon fonctionnement de ses services et altéré la qualité de la gestion et de la vie internes. À l’issue de ces évènements, nous avons été conduits à concentrer l’essentiel de nos efforts au rétablissement d’un bon fonctionnement et d’un climat interne apaisé. Ces efforts ne nous ont malheureusement pas permis d’agir aussi efficacement que nous l’aurions souhaité notamment pour résorber le retard dans la production des études en cours. Malgré ces difficultés, notre organisation a initié dès la fin de l’année 2018 sous la responsabilité de son Secrétaire Général, Yves Veyrier, une démarche d’ensemble visant à apurer le stock des études en cours notamment les plus anciennes. » 

Foutaise, comme disait Blondel, car le Rapport montre une dérive commencée en 2008, pas en 2018 !

Au demeurant, le Rapport (p.43) ne laisse pas de doute quant à l’existence d’une dérive à FO, à base financière: 

« La CGT-FO présentant un retard considérable – pour des études dont il est certain qu’elles n’ont jamais été entamées, comme le montre la multiplication des avenants – a bénéficié d’avances de trésorerie de la part de l’IRES, à hauteur de 0,97 M € pour des études non remises au-delà de trois ans au 31 décembre 2021. »  

Le Rapport précise (p.49) : 

« Les organisations syndicales ont indiqué que les conseillers techniques sont désignés parmi leurs salariés et exercent des missions importantes en leur sein. Ainsi, à la CGT-FO, ce sont des assistants confédéraux au secteur économique (2018-2021) ou au secteur Europe et international (2006-2018) qui jouent ce rôle. »

On comprend que la Cour se demande où va l’argent de l’IRES, puisqu’au niveau de FO on ne voit pas la couleur des études financées par l’argent public.

La réponse de FO : 

« Le budget de chaque étude recouvrait, à hauteur de 33 %, des frais généraux, de 32 % des charges de personnel, de 17 % des frais de valorisation et de 18 % des frais « particuliers » ». 

C’est flou, surtout quand l’étude, en sus, n’est pas rédigée ! Ce d’autant que le Rapport de la Cour précise : 

« Les frais affichés pour la diffusion et la valorisation ne sont pour leur part pas justifiés puisque le syndicat a reconnu, dans ses réponses, n’effectuer aucun travail de diffusion et de communication. » 

Sûr qu’il est difficile de diffuser des études qui n’existent pas !

Ce qui est sûr, c’est que :

« Pour les 28 conventions communiquées, les dotations de l’IRES versées à FO représentaient 2 210 937 € tandis que les contrats passés avec des institutions et chercheurs ayant réalisé lesdites études s’élevaient au total à 415 976 €, soit 18,8 % de l’enveloppe consentie par l’IRES. 

Ainsi, sur cet échantillon, les frais globaux de structure de l’organisation syndicale s’élèvent à 81,2 % (soit 1,79 M € sur 2,21 M € de subvention IRES) ce qui paraît excessif … »

Excessif ! c’est le moins que l’on puisse dire ! Bizarre autant qu’étrange…

Le Rapport fait un bilan sans appel (pp.52/53): 

« Sur la période retenue, la CGT-FO impute des frais divers de gestion de l’ordre de 82 % aux dotations reçues de l’IRES, ce qui laisse 18 % pour les contrats avec les auteurs des rapports. »

Alors que pour la CGT : 

« Tout en restant conséquent, le prélèvement pour frais de gestion au sens large est inférieur de presque moitié à celui constaté avec la CGT-FO. » 

Or la norme, c’est 10/15%, pas 82% !

Il est donc établi par la Cour des Comptes qu’à FO, depuis 2008, a été mis en place un système de demandes financières à l’IRES pour des études pour la plupart jamais réalisés. 

À quoi sert cet argent public s’il ne va pas directement à la réalisation de ces études ?

La question se pose quand on lit que FO a demandé un financement à l’IRES, en 2008 pour « 60 ans d’histoire de FO » et, en 2019, sur « Jouhaux et le BIT » …

Or en 2008, un salarié de FO était en train de rédiger une Histoire de FO de 1895 à 2009, ouvrage de 700 pages qui devait paraître en 2009 avec une préface Blondel-Mailly. Donc l’utilité de cette étude est douteuse ! 

Idem en 2019, pour Jouhaux : en 2014, le même salarié publie un Léon Jouhaux de 900 pages avec un chapitre 9 consacré à Jouhaux et le BIT ! 

Or en 2019, le tandem Souillot-Veyrier plutôt que de lui demander d’y travailler, le met à la porte, alors qu’il est, justement, assistant confédéral. Tout ça pour demander à on ne sait qui, qui n’a jamais écrit sur Jouhaux, de rédiger une étude qui ne verra pas le jour ? Faut-il préciser que, si un livre c’est entre 1 et 3 ans de travail, une étude c’est trois mois ! 

C’est clair, le pourrissement bureaucratique de l’appareil de FO, ces 15 dernières années, fonctionne avec la dérive financière que montre, sans appel, le Rapport de la Cour des Comptes. 

Ça ne peut plus durer ce double jeu dont les conséquences antidémocratiques sont manifestes au sein même de FO et qui joue contre les militants et leur organisation au bénéfice d’une minorité de bureaucrates du syndicalisme. 

En demandant un audit, lors du CCN du 28 septembre 2018, Pavageau a voulu y mettre un terme : dehors Pavageau.

On voit avec ce Rapport que l’éviction de Pavageau pour imposer Veyrier puis Souillot, le candidat « anti-audit », n’a servi à rien. 

L’accord Homez-Raguin, la signature avec la CFDT de textes contraires aux statuts de FO comme à l’intérêt des travailleurs (Ségur, télétravail, partage de la valeur…) ne servent à rien. 

En revanche on constate un pourrissement bureaucratique de l’appareil de FO, qui semble bien commencer vers 2008 jusqu’à ce jour. 

Il suffirait que la Cour des Comptes s’intéresse à l’usage de l’argent de la formation pour montrer l’étendue de la dérive financière. Et de même pour l’argent public qui va au « dialogue social »…

Plus que jamais, un audit est nécessaire à FO pour assainir la situation financière et humaine. 

Alors et plus que jamais, il faut revenir, à tous les niveaux, à un fonctionnement démocratique et social de FO. Retour aux fondamentaux. 

Les Amis de Force-Ouvrière
Septembre 2023

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